Résumé des épisodes précédents pour ceux qui arrivent seulement : ma DRH refuse que je souscrive une assurance santé privée en remplacement de l'assurance-maladie des salariés. Dans ses lettres elle invoque tour à tour la territorialité des lois, le régime "légal", la solidarité nationale
et le droit divin du patron de décider à la place du salarié pour les affaires qui le concernent pourtant personnellement et exclusivement.
J'avais recentré mon discours, dans mes lettres précédentes, sur l'
ordonnance du 19 avril 2001, qui permet à tout un chacun de s'assurer où il veut en matière de santé, retraite et chômage. La DRH en nie tout effet, en déclarant que cette ordonnance permet seulement de s'assurer auprès des mutuelles complémentaires et donc qu'elle n'apporte rien de nouveau ! Un bon gros mensonge. On se demande bien à quoi pourrait alors servir cette loi, et pourquoi le
MLPS a oeuvré pendant dix ans pour la transcription de cette
directive européenne, qui offre
la possibilité pour tout assureur dûment agréé de couvrir n'importe quel risque et qui affirme qu'
il est nécessaire de supprimer tout monopole dont jouissent certains organismes dans certains États membres pour la couverture de certains risques.
D'après les juristes du MLPS, le comportement de ma DRH, s'il se confirmait, serait qualifié des doux termes d'entrave à l'exercice d'un droit, de discrimination, d'extorsion de fonds, et
relèverait du pénal (au secours
Maître eolas !).
Que faire ? Que conseille le MLPS à ceux qui sont dans mon cas - nombreux, car les grandes entreprises refusent toute discussion et se contentent de relayer le plaidoyer pro domo de l'URSSAF, évidemment tout à fait partisan, le geôlier n'étant pas disposé à relâcher ses captifs ? Il conseille de s'adresser à un avocat spécialisé en droit social (lié au MLPS) pour mettre la DRH devant ses responsabilités. Contacté par téléphone, l'avocat m'indique qu'on aboutit en général à un consensus avec l'employeur et qu'il ne connaît pas de cas pour lesquels il ait fallu aller jusqu'au tribunal.
J'avoue que j'aurais préféré envoyer moi-même à ma DRH un document juridique un peu dissuasif, pour ne pas dire comminatoire. Il est vrai que l'intervention d'un avocat aura plus de poids, mais elle a également un prix (quelques centaines d'euros), et elle peut signifier le début d'un vrai bras de fer avec l'employeur. Je vais donc réfléchir quelque temps sur le sujet. Etre libérale, c'est d'abord se prendre en charge avant d'aller demander de l'aide à droite et à gauche, n'est-ce pas ?
Pourquoi ne suis-je pas allée directement voir ma DRH pour en causer ? D'abord parce qu'ils sont dans des bureaux à des dizaines de kilomètres de mon lieu de travail, ensuite parce que je préfère garder des traces écrites. Et je n'ai pas envie d'entendre de leur bouche les boniments que leur souffle l'URSSAF (auxquels ils croient peut-être sincèrement).
A tous ceux qui ont peur d'écrire à leur DRH ("ouh là ! je ne veux pas d'ennui avec mon patron") : eh bien vous avez tort ! Ma DRH m'a jusqu'ici répondu très civilement, même si sa réponse est décevante et montre un certain mépris des droits du salarié. Il y a un minimum de confiance entre salarié et employeur, sinon on se sépare (cela m'est arrivé à plusieurs reprises, je ne l'ai jamais regretté). Ecrivez, évitez les e-mails et le téléphone, montrez-leur que vous êtes bien informé(e), sans doute mieux qu'eux.
Ce qui est scandaleux est qu'en pratique l'exercice de ce droit, la liberté sociale, soit limité actuellement à ceux qui savent (avocats, professions de santé...), à ceux qui ont le temps et l'argent, aux forts en droit et en procédure. Pour une fois qu'une loi ouvre une nouvelle liberté, il a fallu que cela soit soigneusement étouffé par les syndicats, les administrations, les politiques, qui ont évidemment tous un très fort intérêt à garder le statu quo, alors qu'ils devraient informer le public. Cette "solidarité" dont ils parlent tellement et au nom de laquelle ils nous ponctionnent, elle s'exerce d'abord entre eux, de façon à perpétuer l'omerta.
Heureusement, le temps travaille contre eux... D'ici quelques années, si on se fie à l'exemple allemand (avec une libéralisation datant de 1996), un nombre non négligeable de personnes seront parties vers une assurance sociale de meilleure qualité, pour un meilleur prix, loin de la banqueroute collective qu'on nous organise aujourd'hui.